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Le principe de subsidiarité

Centre de Formation à l’Action Civique et Culturelle selon le Droit Naturel et Chrétien

jeudi 8 décembre 2005

Le principe de subsidiarité

Il existe un ordre naturel des choses voulu par le Créateur, un ordre social conforme à la nature humaine, que la doctrine sociale de l’Eglise est à peu près seule à défendre aujourd’hui, ordre selon lequel la société est faite d’une grande variété de corps sociaux situés entre les individus et l’Etat : les "corps intermédiaires".

Ainsi, l’Eglise qui "laisse libre le choix de gouvernement, chose importante cependant pour la conduite des hommes (...), n’a jamais cessé de présenter l’organisation en corps intermédiaires comme un élément essentiel de sa doctrine sociale" (1). Il s’agit aussi bien des corps sociaux naturels que des associations privées que les particuliers peuvent librement constituer entre eux : la famille, le village, la ville ou la province, l’école, l’entreprise, les corps professionnels ou le syndicat sont autant de "corps intermédiaires" qui, malgré leurs différences, ont pour caractéristiques communes d’être à la mesure de l’homme, de favoriser le développement de ses capacités et l’exercice de ses responsabilités.

Les corps intermédiaires ont été combattus par la Révolution qui s’est efforcée de les détruire, d’où la suppression des corporations par la Loi Le Chapelier :"La Révolution n’a laissé debout que des individus et de cette société en poussière est sortie la centralisation car là où il n’y a que des individus, toutes les affaires qui ne sont pas les leurs sont des affaires publiques, les affaires de l’Etat. C’est ainsi que nous sommes devenus un peuple d’administrés", clamait Royer-Collard à la Chambre des Députés en janvier 1822. Mais dans tous les cas, ces corps intermédiaires tendent naturellement à renaître sous une forme ou sous une autre.

C’est parce qu’il permet de résoudre le problème des relations entre les personnes, les corps intermédiaires et l’Etat, que le principe de subsidiarité, principe de base de la doctrine sociale de l’Eglise, doit être connu, respecté et appliqué par ceux-là mêmes qui entendent contribuer à refaire une société humaine et chrétienne.

DEFINITION

Il n’existe pas de formulation plus claire et plus complète du principe de subsidiarité, que celle qu’en donne le Pape Pie XI dans l’encyclique "Quadragesimo Anno" (1931) dont le Pape Jean XXIII reprend lui-même l’essentiel dans l’encyclique "Mater et Magistra" (1961) :

"Parlant de la réforme des institutions, c’est tout naturellement l’Etat qui vient à l’esprit. Non certes qu’il faille fonder sur son intervention tout espoir de salut. Mais, depuis que l’individualisme a réussi à briser, à étouffer presque cet intense mouvement de vie sociale qui s’épanouissait jadis en une riche et harmonieuse floraison de groupements les plus divers, il ne reste plus guère en présence que les individus et l’Etat. Cette déformation du régime social ne laisse pas de nuire sérieusement à l’Etat, sur qui retombent, dès lors, toutes les fonctions que n’exercent plus les groupements disparus, et qui se voit accablé sous une quantité à peu près infinie de charges et de responsabilités.

Il est vrai sans doute, et l’histoire en fournit d’abondants témoignages, que, par suite de l’évolution des conditions sociales, bien des choses que l’on demandait jadis à des associations de moindre envergure ne peuvent plus désormais être accomplies que par de puissantes collectivités. Il n’en reste pas moins indiscutable que l’on ne saurait ni changer ni ébranler ce principe si grave de philosophie sociale : de même qu’on ne peut enlever aux particuliers pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de s’acquitter de leur seule initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler d’une manière très dommageable l’ordre social, que de retirer aux groupements d’ordre inférieur, pour les confier à une collectivité plus vaste et d’un rang plus élevé, les fonctions qu’ils sont en mesure de remplir eux-mêmes.

L’objet naturel de toute intervention en matière sociale est d’aider les membres du corps social et non pas de les détruire ni de les absorber.

Que l’autorité publique abandonne donc aux groupements de rang inférieur le soin des affaires de moindre importance où se disperserait à l’excès son effort ; elle pourra dès lors assurer plus librement, plus puissamment, plus efficacement les fonctions qui n’appartiennent qu’à elle, parce qu’elle seule peut les remplir ; diriger, surveiller, stimuler, contenir selon que le comportent les circonstances ou l’exige la nécessité. Que les gouvernants en soient donc bien persuadés : plus parfaitement sera réalisé l’ordre hiérarchique des divers groupements selon ce principe de la fonction supplétive de toute collectivité, plus grandes seront l’autorité et la puissance sociale, plus heureux et plus prospère l’état des affaires publiques".

Ainsi, le principe de subsidiarité n’est pas un concept arbitraire, abstrait ou purement théorique, "inventé" par la doctrine sociale de l’Eglise, mais un principe de vie sociale si nécessaire et vital qu’on ne peut prétendre changer ni ébranler, soutient Pie XI, sans "troubler d’une manière très dommageable l’ordre social". Il constitue véritablement la clef de voûte de l’organisation sociale dans son ensemble.

La subsidiarité est une expression récente, mais un principe vieux comme le monde : "depuis des millénaires, les peuples européens se réfèrent à l’idée subsidiaire comme M. Jourdain faisait de la prose, c’est-à-dire à leur insu", écrit Chantal Millon-Delsol. Déjà, "la société décrite par Aristote se compose de groupes emboîtés les uns dans les autres, dont chacun accomplit des tâches spécifiques et pourvoit à ses besoins propres. La famille est capable de suffire aux besoins de la vie quotidienne, et le village à ceux d’une vie quotidienne élargie. Mais seule la cité, organe proprement politique, est capable d’atteindre l’autarcie, la pleine suffisance de tout, et c’est ainsi qu’elle se définit : par l’autosuffisance, synonyme de perfection" (2).

Quant à Saint Thomas d’Aquin, il assignait au pouvoir politique la mission de "corriger, s’il se trouve quelque chose en désordre ; suppléer si quelque chose manque ; parfaire si quelque chose de meilleur peut être fait" (3).

Surtout, le principe de subsidiarité est, avant toute chose, un principe de bon sens. C’est si vrai qu’il n’est pas une mère de famille au monde qui ne l’applique en permanence dans l’éducation de ses enfants, au fur et à mesure qu’elle cesse de faire pour eux ce qu’ils deviennent capables de faire par eux-mêmes...

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Principe de subsidiarité
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